En trois ans, crise covid et travail hybride ont accentué de nombreuses exigences du côté des collaborateur·rice·s. Rapport au travail, place et finalité de ce dernier : la donne a changé. Si ces aspirations sont devenues prioritaires, « elles étaient déjà présentes à l’esprit avant même le début de la crise sanitaire. La pandémie a surtout joué un rôle de catalyseur » (étude de la Fondation Jean Jaurès, juillet 2022).
Des exigences dont les organisations et leurs managers (en toute première ligne) doivent prendre conscience, afin de répondre à celles qu’ils auront retenues de manière adaptée, selon leur modèle culturel.
Zoom sur 5 nouvelles attentes salarié·e·s en 2023, sur les approches managériales et pistes de réflexion à disposition des entreprises, offrant la possibilité au leadership de se réinventer.
La place centrale du travail en France continue de reculer
D’après une enquête menée par l’Ifop fin octobre 2022, pour 21% des Français·e·s la place du travail est « très importante » (vs 24% en 2021, et 60% en 1990 selon une note pour la Fondation Jean Jaurès). Il arrive derrière la famille, les ami·e·s, le couple et les loisirs.
Un effondrement du rapport prioritaire au travail lié à au moins 5 phénomènes, et qui s’est accéléré en 2020. La pandémie a prouvé que l’on pouvait travailler à distance tout en maintenant la productivité, grâce à des outils et modes de management adéquats, ainsi qu’à l’équilibre entre présentiel et distanciel.
Un fort besoin de sens et d’équilibre entre vie pro et perso
La crise sanitaire a déclenché une réflexion profonde des individus autour de leurs envies, leurs aspirations, leurs besoins fondamentaux et leurs valeurs. Un « désir d’essentiel ».
D’après une enquête Robert Half menée en novembre 2022, 62% des sondé·e·s seraient devenu·e·s plus exigeant·e·s sur l’équilibre entre vie personnelle et professionnelle. 43% quant à elles et eux privilégieraient la flexibilité, et 42% la quête de sens.
De nouvelles attentes salarié·e·s en 2023 qui constituent un véritable défi côté leadership, tandis que la crise covid a marqué une rupture dans nos rythmes de vie, nos habitudes et nos priorités. Pour bon nombre de collaborateur·rice·s, le travail a perdu son rôle central et structurant, passant au second plan.
Le slashing, ou la recherche d’une vie « multi-activités » pour s’épanouir
Une remise en question du statut d’activité centrale du travail que l’on retrouve à travers l’accentuation du slashing en France (exercice de plusieurs activités professionnelles en parallèle).
Un quart des actif·ve·s français·e·s seraient aujourd’hui des « slashers » (étude menée pour le Salon SME). Une volonté d’émancipation des individus vis à vis du collectif présente avant 2020, qui s’est popularisée depuis. Place au polycentrisme. Nous n’avons plus un mais plusieurs centres de gravité dans nos vies.
Face à cette nouvelle soif de liberté professionnelle, à cette inversion du rapport de force entre l’entreprise et ses talents, les managers sont sommé·e·s par leurs équipes d’adapter leur vision et leur leadership. Horizontalité, besoin d’autonomie et de transparence font à présent partie de l’équation.
Plus d’unité de lieu ni d’unité de temps, place à l’intermittence
Outre l’unité de lieu, le travail se caractérise aussi par le recul de l’unité de temps. Avec le télétravail et l’hybride, le temps de travail s’est émietté. La continuité du travail a connu une rupture. Il n’est plus ni linéaire ni cadencé.
La tendance est à la concentration de ce temps sur une plus courte période, pour plus de productivité et de temps libre. C’est ce que reflète l’expérimentation croissante du modèle de la semaine de 4 jours. Une nouvelle répartition du temps de travail plébiscitée par 6 Français·e·s sur 10 (ADP Research Institute, étude People at Work 2022, 2021).
Leadership distanciel : de l’importance de préserver l’engagement
Un engagement essentiel dans un contexte de management hybride. Alors que le contrôle, le temps subordonné, le monitoring d’objectifs, les KPI ne sont plus des leviers suffisants avec la distance.
Comme l’indiquait Mathilde Le Coz, DRH de Mazars France, à l’occasion du petit-déjeuner Greenworking du 26 janvier dernier : « L’engagement se mérite. De fait, il est fondamental d’identifier de nouveaux leviers clés pour réussir à le susciter auprès des collaborateur·rice·s ».
Parmi eux la confiance, sur fond de disparition des contraintes, d’explosion du slashing, et de réduction du temps de travail. Mais aussi l’écoute et le management par le cap, non par les processus de création de valeur.
De fortes exigences en matière de « care management »
Les salarié·e·s attendent enfin que l’organisation fasse de leur santé mentale au travail et du « care » des priorités majeures.
D’après Cécile Dejoux, Directrice de l’observatoire du futur du travail du Cnam (le Learning Lab Human Change), « les entreprises qui affichent, déclinent, et accompagnent le management par le CARE dans une logique systémique sont celles qui répondent le mieux aux besoins de leurs collaborateur·rice·s et des équipes (…). Le management par le CARE permet de reprendre le pouvoir sur le temps, l’engagement, et le sens au travail » (Mag RH&M, avril 2023).
Parmi ses composantes, le « self care » consiste à « prendre soin de soi, un basique qui devrait être la priorité des RH qui ont la responsabilité de veiller à la QVCT ». Le « team care » quant à lui se définit « comme l’art de savoir prendre soin de chacun de ses salarié·e·s dans l’équipe ».
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Leadership et nouvelles attentes salarié·e·s en 2023 : nos retours d’expérience
Face à ces nouvelles exigences, Greenworking a répertorié auprès de ses clients au moins 6 réponses managériales. Il n’existe pas de recette unique. L’objectif est d’éclairer les dirigeant·e·s, de les rendre autonomes. Pour leur permettre de s’adapter à différents profils et différentes situations. Parmi ces approches :
Outil n°1 : le management par la qualité
Le principe : redonner du sens au travail et éviter le piège du bonheur, qui consisterait à orienter les pratiques managériales et les efforts RH uniquement vers le fait de se sentir bien. Or c’est la tâche qui doit générer du bien-être au travail. La clé de cette approche ? La qualité du travail pour les collaborateur·rice·s au moment de travailler.
Outil n°2 : le management intentionnel
Dans un contexte de distance, de repli, et de désincarnation du travail, ce qui n’est pas organisé par l’entreprise (intentionnel) n’arrive pas. Cette approche managériale consiste à répondre aux enjeux d’unité de lieu et d’intermittence en mode hybride. Elle permet de poser des intentions, d’avoir des structures de socialisation, des espaces de partage de connaissances. Là où les choses se faisaient naturellement au bureau.
Contribution contrainte (tour de table, météo, brise-glace, etc.), valeurs et comportements explicites, convivialité, et informel organisé, sont autant d’axes opérationnels à disposition du leadership.
Outil n°3 : le management asynchrone
Enfin, comme nous l’indiquions dans un précédent article sur l’asynchrone, de l’importance de sonner le glas des réunions contre-productives notamment, afin de préserver trois précieuses ressources au sein de l’organisation : le temps de travail, l’engagement, enfin le capital cognitif et le bien-être.
Place à la flexibilité, au différé pour effectuer ses tâches, sans horaires imposés et à son propre rythme.
Pour 26% des salarié·e·s, réduire le temps passé en réunions synchrones permettrait de diminuer la fatigue, de réaliser des tâches professionnelles à valeur ajoutée (25%), de davantage interagir avec ses collègues (21%), de profiter d’un temps personnel de qualité (21%), et de réduire son niveau de stress (20% – enquête Opinionway pour Slack, 2022).
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